• Thaksin et son pot







    Et un petit papier de politique thaie pour faire bonne mesure...

    Thaksin tourne autour du pot

    Thaksin Shinawatra cherche du boulot. « J'ai
    besoin d'un job parce que je suis sans emploi », a-t-il lancé, sans rire, à
    un journaliste qui l'a « surpris » à faire du shopping à Hong Kong. L'ex-premier
    ministre, s'il n'a plus d'emploi salarié, garde un rôle privilégié sur la scène
    politique : celui de l'empêcheur de tourner en rond. En exil depuis le
    coup d'Etat militaire du 19 septembre, Thaksin joue avec les nerfs des généraux
    en brandissant la menace d'un retour au pays. Tel un aigle tournoyant au-dessus
    de sa proie, il a visité en novembre plusieurs pays d'Asie, s'y faisant volontiers
    remarquer par la presse locale. En Chine tout d'abord, puis à Hong Kong et à
    Bali, il s'est employé à distiller l'idée qu'il pouvait, d'un coup d'aile, revenir
    à Bangkok. Fin novembre, il devait se rendre en Australie, puis à nouveau en
    Chine. La thèse d'un retour de Thaksin s'est vue accréditée par l'insistance du
    général Chavalit Yongchayud, ancien premier ministre et conseiller de la junte
    militaire, qui a déclaré souhaiter qu'il revienne rapidement. Les mauvaises
    langues habituelles ont expliqué qu'il exprimait ainsi sa colère envers les
    militaires, qui n'auraient pas récompensé son soutien à sa juste valeur. Mais
    la position de « Big Jiew » n'est pas anodine : Thaksin
    Shinawatra, du fond de son exil, est la principale menace pesant sur les
    nouveaux maîtres du pays.

    Le premier ministre Surayud Chulanond a été très
    clair : il ne souhaite pas que son prédécesseur remette les pieds dans
    le royaume avant la tenue de nouvelles élections démocratiques, prévues pour la
    fin 2007. Deux mois après leur prise du pouvoir par la force, les militaires n'on
    que partiellement réussi leur « coup ». Les enquêtes lancées sur
    plusieurs affaires de corruption ou d'évasion fiscale, visant à éliminer
    juridiquement Thaksin et ses proches, ne semblent pas avoir accouché de
    suffisamment de preuves tangibles. Dans le même temps, les premières rumeurs
    sur la corruption du nouveau pouvoir circulent déjà parmi l'élite. Par
    ailleurs, la tentative de pulvérisation du Thai Rak Thai, l'ancien parti
    majoritaire, a certes abouti à la désertion de centaines de députés et de
    cadres du parti. Mais le cœur des supporters de Thaksin, dans les provinces
    rurales du Nord et du Nord-Est, semble loin d'être convaincu. Pour ces
    raisons-là, la junte hésite encore, fin novembre, à lever la loi martiale. Autoriser
    les partis politiques à reprendre vie serait donner aux fidèles de Thaksin un
    espace dont ils s'empareraient, justement, pour miner le processus de
    reconstruction démocratique qu'ils prétendent mener. C'est un paradoxe dont
    aucune junte militaire, ici ou ailleurs, n'a jamais su se sortir : on ne
    protège pas la démocratie en niant la démocratie.

    François Tourane


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